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La CSPPA n'en a pas fini avec FLASHPOINT

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Deux ans et demi après avoir vu le jour, le projet FLASHPOINT, lancé initialement par huit écuries co-actionnaires, semble plus que jamais en péril. Sans doute trop ambitieuse dans son fonctionnement interne et chahutée par une période Covid survenue au pire des moments, cette compétition a accusé le départ de ses figures jusqu'à n'être aujourd'hui déjà plus qu'un lointain souvenir pour certains. Mais quand un souvenir doit de l'argent, il n'est plus si éloigné pour d'autres.

Souvenez-vous. Nous sommes en janvier 2020, l'AFP vient d'alerter sur une pneumonie d'un genre nouveau ayant infecté quelques personnes en Chine et Astralis est encore la meilleure équipe du monde, forte de ses trois sacres majeurs consécutifs. Ce début d'année, on ne peut plus banal, est aussi marqué par la création d'un nouvel acteur censé révolutionner l'écosystème autour de Counter-Strike. D'abord connu sous le nom de code B Site, le projet s'officialise quelques semaines plus tard sous l'appellation FLASHPOINT.

La barre est placée très haute. Pour la première fois de l'histoire de Counter-Strike, huit écuries, majoritairement originaires d'Amérique du Nord, ont chacune investi deux millions de dollars pour constituer leur propre ligue franchisée dont elles seront toutes co-actionnaires. Les revenus générés par le championnat retomberaient ainsi directement dans les poches de ces équipes fondatrices. L'idée est ambitieuse, et pas non plus dénuée de sens à l'heure où le débat sur la rentabilité des écuries évoluant dans le milieu du sport électronique se fait de plus en plus oppressant.


C'était pas si dégueu... au début.

En fixant le prix d'entrée à deux millions de dollars, cette joyeuse organisation souhaitait s'assurer de l'engagement des structures qui, de manière mécanique, auraient dû tout faire pour participer au succès du projet, en investissant massivement dans des joueurs de renom par exemple. Une fois les huit organisations réunies autour de la table, la société de production trouvée, en l'occurrence ici FACEIT, entrée au capital de FLASHPOINT à la hauteur de 5 %, et plusieurs figures de la scène embauchées, Duncan "Thorin" Shields et Christopher "MonteCristo" Mykles notamment, il ne restait plus qu'à lancer la première saison.  

Une édition inaugurale qui aurait dû s'achever dans le prestigieux Ericsson Globe, renommé depuis en Avicii Arena, en plein coeur de Stockholm. Il n'en fut rien, le Covid ayant forcé les organisateurs à revoir leurs plans, migrant vers les studios californiens de FACEIT avant de se résoudre à terminer sur Internet. FLASHPOINT n'en ressortira plus.

Les premiers déboires autour du projet n'ont pas mis longtemps à apparaître. Les écuries, ayant pourtant investi au lancement, disparaissent du paysage l'une après l'autre, sans réellement donner d'explications. Duncan "Thorin" Shields quitte également le navire, soulignant au passage le désintérêt croissant des différents co-actionnaires incapables de rassembler des équipes compétitives. Il faut dire que de l'autre côté, ESL et BLAST, les deux organisateurs concurrents fortement hostiles au projet, n'ont pas chômé et ont également mis en place leur propre système de partage de revenus avec les écuries au travers de divers contrats.

Malgré tout, et un peu à la surprise générale, FLASHPOINT obtient l'organisation du premier tournoi RMR qualificatif pour le PGL Stockholm Major. Une reconnaissance de la part de Valve qui ne suffira pas. Depuis la fin de cet énième tournoi en ligne, en mai 2021, c'est silence radio. Le site Internet officiel du championnat, lui-même, ne répond plus.


Thorin, figure de proue du projet, devenu critique principal.

Notre confrère Jacob Wolf révélait récemment les départs successifs du conseil d'administration des différents dirigeants des structures co-fondatrices de la ligue. Il faut dire que sur les huit, seules deux possèdent encore une équipe CS:GO à l'heure où nous écrivons ces lignes (Cloud9 et MIBR), et elles ne communiquent quasiment pas quant au futur d'un projet qui semble plus que jamais proche de la disparition.

Il est sans doute facile de cerner le sentiment d'amertume ayant saisi les différentes parties prenantes lorsqu'elles ont compris qu'elles ne reverraient probablement jamais leur mise de départ.

Mais peut-être serait-il néanmoins trop facile de disparaître de la sorte.

Car en coulisses, un organisme n'est pas prêt de lâcher l'affaire. La CSPPA, le syndicat international des joueurs professionnels, envisage, selon nos informations, d'entamer une procédure judiciaire à l'encontre de B Site, société mère de FLASHPOINT. Une nouvelle affaire à venir qui nous permet d'explorer les contours d'une manne de revenus encore relativement méconnue pour les joueurs, de par son caractère nouveau.

Comment un joueur de CS:GO professionnel gagne-t-il sa vie ? Quatre sources distinctes paraissent évidentes : le salaire versé par son équipe, les contrats de sponsoring qu'il est libre ou non de signer, les revenus liés aux stickers et les prizepools remportés en compétition. Depuis quelques années désormais, un cinquième flux s'est ouvert.

Il s'agit du partage des revenus générés par un tournoi. Non seulement, ESL BLAST et FLASHPOINT répartissent une partie des revenus générés par leurs compétitions (droits de diffusion, sponsoring, billetterie...) entre les écuries partenaires, mais ils le font également avec les joueurs de ces dernières. C'est d'ailleurs ici que le rôle de la CSPPA prend tout son sens puisque c'est bien ce syndicat qui a négocié en grande partie ces accords dans l'intérêt des joueurs.

La répartition des revenus est même publique dans certains cas. Cela l'est notamment pour ESL et son Louvre Agreement qui lie quatorze des meilleures équipes du globe à l'organisateur jusqu'à 2025, au moins. Les joueurs sous contrat avec une écurie partenaire des accords du Louvre se partagent 15 % de la part dédiée à leur écurie. Cela ne représente sans doute pas des sommes faramineuses jusqu'à maintenant mais il s'agit d'une source de revenus à fort potentiel, puisque proportionnelle à la capacité d'ESL à vendre ses compétitions à l'avenir.


Extrait de l'accord entre la CSPPA et FLASHPOINT au sujet du minimum garanti pour les joueurs

Côté FLASHPOINT, pas de pourcentage public mais un minimum garanti chaque année. Si l'on considère l'année 2020 comme la seule année d'exercice de FLASHPOINT (les deux seules saisons franchisées ayant eu lieu cette année-là), chaque joueur aurait dû toucher une partie des 457 500 $ lui étant dédié. Divisé par huit (nombre d'équipes), puis par cinq (nombre de joueurs par équipes), cela représente tout de même plus de 11 000 $ par tête.

C'est cet argent qui manque à l'appel et qui amène aujourd'hui la CSPPA à rassembler les signatures des participants des deux premières éditions afin de lancer une action en justice collective contre B Site et FLASHPOINT. Selon nos sources, les contacts entre les deux entités seraient totalement rompus à ce stade.

Ce n'est pas la première fois que la CSPPA et FLASHPOINT se retrouvent face à face. À l'issue de la première saison, au printemps 2020, il y avait eu de l'eau dans le gaz au sujet, déjà, d'un partage de revenus réservés aux joueurs. FLASHPOINT reprochait alors, entre autres, à la CSPPA d'avoir fait tomber à l'eau un contrat de sponsoring avec une marque d'écran, ce qui avait valu à la ligue de suspendre un paiement de 165 000 $ au profit du syndicat.

Il s'agit sans doute ici davantage d'une histoire de principes plutôt que d'un réel enjeu financier pour la CSPPA, mais qui pourrait tout de même bien asséner le coup de grâce à un projet quasiment mort-né. Une nouvelle épine dans le pied d'un cadavre.

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