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Ex6TenZ, le parrain

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Deux ans et demi après la parution du magazine VaKarM, fin 2021, nous avons décidé de mettre en ligne les principaux articles le composant, histoire d'en faire profiter ceux qui ne l'avaient pas commandé à l'époque. Ne vous étonnez donc pas si ces articles vous disent quelque chose, il est possible que vous les ayez déjà lus sur papier !

Interview réalisée en juin 2021 par MrHusse

Leader de la meilleure équipe de l’histoire de Counter-Strike: Source, mentor des plus grands joueurs de la scène française, capitaine respecté par-delà les frontières, Ex6TenZ a laissé une trace indélébile dans l’histoire de CS. Il revient sur ce qui a construit sa légende et, par là, dresse le portrait de ce que doit être un grand capitaine.

Est-ce que tu as directement débuté en tant que leader ? Tu as joué avec AsP chez redLine, est-ce qu’il y a eu d’autres influences au début de ta carrière ?

Très peu d’influences au final hormis AsP, un petit peu. En fait, à mes débuts, tout le monde évitait le lead dans mes équipes. C’était le job que personne ne voulait faire, donc même en y réfléchissant, j’ai eu assez peu d’influences.

Quid de la suite de ta carrière ? Est-ce qu’il y a certains leaders dont tu préférais regarder les démos ?

Je pense qu’au début, j’étais vraiment en avance sur beaucoup de monde, c’est moi qui donnais la direction de comment se passaient les choses, c’est moi qui faisais la méta. Pendant longtemps, ça a été comme ça, même chez VeryGames. Je pense que je bossais plus que les autres et on avait quasiment tout le temps un temps d’avance. En officiel, je faisais attention à tous les détails, je regardais ce que faisaient les autres, mais je ne faisais pas forcément de recherches approfondies sur un leader ou une équipe en particulier.

Après, sur CS:GO, lors de la période contre NiP, je me suis posé la question "à quel point je dois laisser de la liberté à mes joueurs ?", parce qu’eux étaient dans un style un petit peu plus libre que nous. Je pense qu’on avait un meilleur jeu qu’eux à partir du moment où on a eu les joueurs capables d’évoluer dans un système, ce qui n’était pas le cas pour kennyS. Dès qu’on a eu shox, s’il n’y avait pas de problèmes d’entente, on se sentait plus forts que NiP. Peut-être que leur jeu très freestyle leur correspondait parce qu’ils étaient très forts en clutch aussi, ils étaient meilleurs que nous sur ce plan. Ils nous ont dominés en grande partie grâce à ça, à des actions individuelles. Eux avaient f0rest et GeT_RiGhT alors qu’on avait "que" shox.

Ensuite, une équipe que j’ai beaucoup observée, c’était Luminosity/SK/MIBR. Eux, quand ils ont dominé, j’ai cramé leurs démos, et je pense que c’était une connerie.

Pourquoi ?

Le secret n’était pas dans le jeu en fait. Ils avaient un lead autour du sniper et c’est FalleN qui débloquait toutes les situations. Mais si tu n’es pas leader-sniper, tu ne peux pas jouer comme eux. J’ai tenté des choses avec mes équipes et c’était trop dur pour le sniper d’endosser autant de responsabilités.

Est-ce que c’est pour ça que tu t’es remis au sniper pendant un moment chez LDLC ?

Ouais, exactement. to1nou avait déjà des difficultés depuis un long moment mais l’influence des Brésiliens a joué. De base, on attendait plus de to1nou, et quand on a vu SK, tout le monde voulait faire comme eux, et nous aussi. Sauf que to1nou ne comprenait pas ce qu’on lui demandait de faire. Il fallait que quelqu’un essaye et je m’y suis collé. Ça n’a pas été concluant, ce n’était pas une bonne idée (rires).

Lorsque tu es arrivé sur Source, comment qualifierais-tu ce que tu as amené tactiquement, ce qui t’a permis de prendre autant d’avance aussi rapidement sur tes concurrents ?

C’est le contexte qui a joué. Je voulais être numéro 1, battre krL, VeryGames, etc. J’avais des joueurs vraiment moins forts, on s’en rendait compte à l’époque mais avec le recul, sur le papier, il n’y avait pas photo. Tu avais shox, RpK et SmithZz en face, moi j’étais tout seul. J’avais Shokkk, il était très solide, mais il y avait une classe d’écart avec leurs joueurs, en termes de créativité, de capacité à faire la différence, de confiance en soi. shox et SmithZz, c’étaient des mecs avec une confiance de dingue, capables de te tuer un match à eux tous seuls. Et RpK, c’était le plus solide à l’époque.

Donc je n’avais pas le choix, je devais travailler plus, avoir un meilleur fond de jeu, optimiser tout ce qui me passait par l’esprit. Et surtout, j’ai essayé de beaucoup vulgariser ce qui était compliqué pour mes joueurs. C’est quelque chose que j’ai toujours voulu et aimé faire, je pense que ça a longtemps été une de mes forces. Je leur expliquais tout et n’importe quel joueur que je récupérais, je le faisais énormément progresser parce que je passais du temps à rendre facile ce qui était compliqué. Un peu comme quelqu’un qui fait des vidéos YouTube pour sa communauté aujourd’hui, sauf que moi je le faisais pour des joueurs pros, donc c’était un peu plus poussé.


Ex6TenZ - RpK - krL, deux leaders pour un tank


Tu as toujours eu la réputation d’être un innovateur, de  chercher des petits détails pour faire la différence. On se souvient notamment des fameux "rounds Ex6" avant que les pauses tactiques deviennent monnaie courante. Quel était ton processus en général pour trouver cette nouveauté ? Comment tu pensais à ce genre de choses ?

Je pense que ma réponse ne sera pas très sexy : c’est un travail au quotidien pour trouver le détail qui va faire la différence. Tu vas voir des pistes qui vont guider ta réflexion vers la nouveauté. Encore maintenant, on réfléchit à tout, je pourrais te faire une liste de 150 choses que tu peux optimiser. C’est pour ça que j’ai toujours été capitaine dans mes équipes, et pas seulement pour le titre, je l’étais vraiment. Il y a trop de petites choses que tu peux améliorer pour faire la différence et j’ai toujours essayé de bosser là-dessus.

En parlant de ce rôle de capitaine, RpK s’est récemment fait kick de chez Vitality. On a entendu parler d’un de ses principaux défauts, à savoir le besoin de se faire micro-manager, de lui donner en permanence des instructions claires sur ce qu’il devait faire. Toi justement, tu avais la réputation d’être un leader comme ça, qui guidait beaucoup ses joueurs, qui encadrait de près tout ce qui se passait sur le serveur. C’était vraiment la meilleure manière d’optimiser ton équipe, c’est là que tu te sentais le plus à l’aise en tant que capitaine ?

Déjà, j’ai eu les deux. Il m’est arrivé de laisser beaucoup plus de liberté à mes joueurs, par exemple chez Titan avec apEX et kennyS, qui étaient deux joueurs qui avaient des difficultés à jouer dans un système. Je leur laissais énormément de liberté, trop même je pense pour que l’équipe fonctionne vraiment.

Je pense que c’est important d’avoir des gens qui savent exactement ce qu’ils doivent faire. Ça peut venir du leader mais ça peut venir d’autres joueurs, comme le co-lead. Mais le leader voit plus loin que le reste, il doit pouvoir donner la direction.

Je sais qu’on a pu me le reprocher. Je pense à shox, c’est une des raisons pour lesquelles on l’appelait la "princesse shoxie". Je ne le dis pas méchamment, c’est vraiment en rigolant, mais à l’époque ça correspondait bien. Quand je jouais avec lui chez VG et qu’on dominait tout le monde, il partait et il revenait de l’équipe parce qu’il trouvait ça dur d’avoir quelqu’un en permanence sur le dos, qui lui rappelait ce qu’il devait faire. C’était une des raisons pour lesquelles il partait. Mais à la fin, ceux qui voulaient gagner, ils revenaient. Quand tu as un mec qui "sait", c’est chiant parfois, tu brilles un peu moins, notamment parce que j’ai toujours été contre les superstars dans mes équipes. Mais ça reste important d’avoir cette personne qui connaît la bonne direction.

Il y a eu des moments dans ma carrière où j’ai moins eu ce rôle, j’étais peut-être moins chiant, mais je ne faisais pas gagner mon équipe. Donc je pense que dans ces moments, les gens avaient vraiment, vraiment tort de me le reprocher. Pour moi, c’était une des clés de la victoire. Au final, tant que je sais exactement quoi faire et que je ne laisse pas de liberté, c’est très bon signe (rires).

On s’avance un peu et on arrive sur la transition vers CS:GO, avec un jeu nouveau, de nouvelles possibilités permises par les cartes, les armes, les grenades. Comment est-ce que tu t’adaptes ? Est-ce qu’il y a une remise en question de ce que tu faisais sur Source ou est-ce que l’évolution se fait de manière naturelle ?

Le premier gros changement, ce sont les flashs. Après évidemment, le plus gros bouleversement, ce sont les cartes. Elles ont beau être similaires, il y a quand même un partage des ressources très différent. La façon de les jouer varie beaucoup. Sur les grenades, c’est quelque chose que j’avais optimisé façon Astralis, notamment les flashs. Elles sont moins fortes sur GO, les smokes marchent différemment et les molotovs rajoutent de la variété, même si les gens ont mis beaucoup de temps pour bien les maîtriser.
 
Rapidement, tu perçois ce que tu vas devoir changer et optimiser ? Ou est-ce que tu as un temps d’adaptation assez long, même si VG était déjà très solide au début de CS:GO ?

Au début, on garde pas mal de choses de Source. Dans les deux premiers mois, on joue de façon similaire. Ça va nous aider à dominer quasiment tout le monde à part NiP. Mais ce n’était pas évident dans l’ensemble, ça prend du temps. C’était un tel changement que tout le monde se cherchait pendant une bonne année. La différence se faisait pas mal sur les individualités.

L’arrivée sur GO, c’est aussi la rencontre entre les scènes 1.6 et Source. Tu vas commencer à affronter HaRts, le plus grand leader de la scène 1.6 française. Il était connu pour son style de jeu très calme, avec beaucoup de control maps. Tu le découvres sur GO ou tu le suivais un petit peu avant ça ?

Je n’ai pas suivi 1.6 en compétition, je regardais juste les vidéos.

Quand on parle de HaRts et Ex6TenZ, il y a un match qui ressort, c’est la finale de l’ESWC 2013 entre Clan-Mystik et VeryGames. À l’époque, ça représente une sorte d’apogée entre le meilleur leader de Source et le meilleur leader d’1.6. Quel souvenir gardes-tu de ce match malgré l’issue malheureuse pour VG ?

C’était un match nul (rires). On sortait de quatre mois de bataille contre NiP, on commençait à gagner contre eux et on est en plein relâchement. On avait beaucoup travaillé avec Richard (shox) parce que quand il était arrivé, on n’arrivait pas à gagner au début. Puis on a commencé à enchainer trois-quatre victoires, genre EMS, StarLadder, qualifs Chine, Chine (ndlr : MSI Beat IT, dont les finales avaient lieu en Chine), et on arrive à l’ESWC de façon plus décontractée. On bat NiP alors qu’on ne doit pas les battre, c’est juste qu’on a le public pour nous.

Avant la finale, il n’y a rien qui va. Deux de nos joueurs sortent la veille et sont limite bourrés pendant le match (ndlr : la finale s’est jouée à 9h30), j’exagère à peine. L’état d’esprit est en mode comique et détente.

Clan-Mystik, on sait qu’on est largement meilleurs qu’eux. Le matin du match, SmithZz balance que si on perd contre eux, il arrête sa carrière, alors qu’on essaye de se mettre dans le match, c’est catastrophique. C’est pas nécessairement un si mauvais souvenir parce que ça devait arriver, connaissant les zigotos dans l’équipe. C’était sûr qu’on allait vivre ce genre de moments. Mais on ne pouvait pas faire pire.

Dans la salle, il fait 9°C. Je pense que KQLY triche à ce match-là, et je pense qu’il triche encore plus quand on perd contre LDLC quelques mois plus tard à la CPH. Faut même pas me parler de bataille tactique, il n’y a pas eu de match, on était à 10 % de notre niveau, 10 % de notre motivation, 10 % de notre mental, je pense que c’est le pire match qu’on ait fait avec cette équipe (rires).

Ce match-là est une blague, je n’ai aucun souvenir tactique. J’ai juste souvenir de me geler les couilles à 9h du matin parce qu’ils n’avaient pas chauffé la salle, c’était en hiver, l’enfer, on ne pouvait pas tirer droit. Il y avait un seul mec qui nous éclatait, c’était KQLY, avec kioShiMa, et voilà, une blague.


Un an avant le drame, Ex6TenZ et KQLY déjà côte-à-côte

 

Sur Source, tu étais un joueur qui fraggait assez fort, alors que sur GO, on a l’impression que tu étais un peu plus en retrait sur la majorité de ta carrière. Comment est-ce que tu l’expliques ?

Sur Source, j’étais au-dessus je pense. Ce n’est pas du tout modeste mais dans ma définition, je me considère comme le meilleur joueur à avoir dans son équipe pour gagner, ce que j’ai toujours voulu être. Ça ne veut pas dire le meilleur joueur du monde, qui est celui qui frag le plus. Pour moi, le meilleur joueur, c’est celui qu’il faut avoir dans son équipe pour gagner. J’étais ce joueur et ça me rend plus fier que n’être "que" celui qui frag.

Sur GO, j’étais moins fort individuellement, c’est clair et net, moins explosif, moins capable de faire la différence. Je ne peux pas le nier, il n’y a pas de malaise.

Après sur Source, je n’ai jamais été bon au niveau des stats. Les gens pensent que c’était le cas mais c’est surtout que j’étais spectaculaire, je prenais plus de risques. Mes stats ont toujours été pas terribles parce que je passais souvent devant en attaque, surtout dans les rounds compliqués. J’ai toujours été premier du trio, premier de rush, des rôles qui ne permettent pas d’avoir des bonnes stats. C’était pareil sur GO, d’autant que j’ai moins snipé à ce moment-là, je jouais un rôle plus support.

En continuant la chronologie, on arrive à la période Titan en 2014. Pendant quelques mois, kennyS est le meilleur joueur du monde, sans contestation possible. Tu as souvent eu des joueurs stars qui ont atteint leur apogée sous tes ordres : RpK sur Source, shox en 2013 chez VG... Même si ce sont des joueurs différents, et bien que tu disais que tu n’aimais pas trop l’idée de starplayer, comment est-ce que tu faisais pour tirer le meilleur de ces talents bruts ? Est-ce qu’il y avait une réflexion autour d’eux précisément, ou est-ce que c’était le système déployé qui les faisait briller presque automatiquement ?

Je pense que ma réponse ne va pas plaire aux gens. En gros, j’ai joué avec kennyS sur Source et CS:GO, et on n’avait pas réussi à le faire évoluer dans un système. Système que je n’étais pas le seul à pousser : NiaK (ndlr : manager qui a suivi Ex6TenZ pendant de longues années) aussi était pour cette façon de jouer, SmithZz et shox aimaient beaucoup cette façon de jouer. Et en fait, on sait qu’on ne peut pas jouer le jeu qu’on aime avec kennyS, même en 2014. Il fait trop d’erreurs pour ce jeu-là et ça va être compliqué pour tout le monde, y compris lui. Même quand il revient et qu’il a gagné en expérience, il garde cette difficulté, et je pense que c’est encore le cas aujourd’hui. Il a gardé les mêmes forces et les mêmes faiblesses.

Donc on n’a pas le choix et on part dans l’extrême opposé où on se dit qu’on va tourner notre jeu autour de lui, et tout le monde va jouer pour lui et apEX. C’est particulièrement flagrant en attaque où les rounds tournent autour d’eux, on leur laisse beaucoup de temps pour travailler. Nous on solidifie la carte autour, et eux cherchent à trouver l’ouverture. Si nous on prenait plus de liberté sur les côtés, ils n’auraient pas eu le temps de faire ce qu’ils voulaient. Je pense que kennyS n’a jamais autant kiffé le jeu de toute sa vie. Je sais ce que c’est, j’ai snipé sur Source, avoir des rounds tournés autour de soi, c’est magique.

Mais à refaire, je ne pense pas que je le referais. Tourner son jeu autour de deux personnes, ce n’est pas bon du tout. C’était peut-être le mieux qu’on pouvait faire avec l’équipe à ce moment-là, je ne sais pas. Encore aujourd’hui, je ne suis pas certain. Ce qui a été intéressant, c’est que ça nous a permis d’expérimenter ce style de jeu, qui est un système en soi, même si c’est très simple.
 
Vu de l’extérieur, les styles de lead sont souvent perçus comme un continuum qui irait des leaders qui laissent beaucoup de liberté, qui jouent en réaction aux informations obtenues en control map, jusqu’aux leaders très restrictifs, avec un système carré, des exécutions et un plan de jeu prédéfini. Qu’est-ce que tu penses de cette vision, est-ce que ça permet de bien rendre compte de la réalité du lead in-game ?

Moi, en tant que lead, j’ai probablement une plus grande expérience que les trois quarts des leaders. Je dirais que je suis moins facile à mettre dans une case. J’ai eu différentes équipes, différentes générations de joueurs et j’ai adapté mon style aux joueurs que j’avais. Peu de leaders ont eu des joueurs aussi différents que moi. Quand tu joues avec shox et SmithZz, tu ne joues pas le même jeu qu’avec apEX et kennyS. En tout cas à cette époque, je pense qu’ils font moins d’erreurs aujourd’hui qu’ils en faisaient à l’époque. Mais on ne pouvait pas jouer le même jeu.

Après, il y a un style de jeu que je préfère. Côté défense, c’est un système avec quelques rounds différents qui vont très bien ensemble, qui permettent d’avoir un effet boule de neige si le premier passe. De manière générale, je voulais un style de jeu sans erreur, horrible à jouer. J’ai toujours adoré être une équipe hyper chiante à jouer en défense. Varier entre passivité, agressivité, entre des extrêmes. J’ai toujours été à la recherche de ça. Et je pense qu’il y a des périodes où je l’ai très bien fait.

On parle souvent de mon lead d’attaque, mais je pense que j’étais un meilleur lead de défense que d’attaque. Des gens comme Thorin s’en étaient rendus compte, il parlait du "système Ex6". En défense, j’ai toujours travaillé sur la profondeur de jeu avec différentes étapes : step 1, on a prévu ça, on bloque les rounds rapides ; step 2, on anticipe cet autre type de round ; step 3, on était prêts pour tout. Et on avait les cartes jokers casse-couilles pour retourner les maps. Après, je ne vais pas trop en dire parce que je joue encore à Valorant, je n’ai pas envie de tout donner (rires).

Côté attaque, c’est presque plus dur à définir au final. Comment tu le décrirais toi par exemple ?

D’un point de vue spectateur, on a souvent opposé ton style à celui d’Happy, qui avait un jeu très explosif, avec beaucoup de 4-1, très simple et réactif. Quand on pensait à Ex6TenZ, il y avait un côté plus lent, plus construit, un plan de jeu bien défini, avec pas mal d’exécutions complexes. Tu parlais de Thorin, il utilisait cette grille de lecture pour comprendre certaines difficultés de LDLC en ESL Pro League. Il expliquait notamment que vous arriviez tout le temps à prendre les sites et planter la bombe, grâce aux stratégies, mais que vous n’arriviez pas à tenir les retakes, parce que les joueurs n’étaient pas assez forts.

Ouais, c’est dur de parler de mon jeu terro au final. Je pense que tout le monde a plus ou moins les mêmes choses. Moi j’essaye d’être vraiment très varié, d’avoir la nouvelle idée. On essaye d’utiliser le temps, de garder le contrôle, de gérer les changements de rythme, d’être difficiles à lire, de se battre pour l’espace et de se donner un maximum de possibilités. C’est ça le contrôle, tu prends le plus de zones neutres possibles en fonction de ton équipement.

L’idée, c’est aussi de fatiguer l’adversaire. Par exemple dans les anti-écos, il y a une grosse différence entre un round rapide où tu les éclates et un round lent où tu vas les fatiguer. Jouer avec le rythme, c’est hyper important et j’ai toujours essayé de chercher l’entre-deux. Je ne voulais pas être aussi extrême que Na’Vi ou HaRts, qui n’étaient que lents, mais je ne voulais pas être que rapide, comme beaucoup d’équipes.

Mais ouais, j’ai toujours eu du mal à définir mon style d’attaque, parce que je trouve que la plupart des équipes cherchent la même chose. Je ne me sens pas dix fois meilleur sur le side d’attaque. Alors qu’en défense, il me semble que j’apporte quelque chose de plus personnel, notamment par rapport aux autres. Je pense que je bossais un peu plus que les autres les sides d’attaque, mais beaucoup plus les sides de défense.


La tête dans les notes

 

Lorsqu’on écoute les TeamSpeak de Titan, on se rend compte qu’en 2014, apEX est un co-lead extrêmement actif. En attaque, il parle même presque autant que toi. Est-ce que tu as toujours cherché à avoir des co-leads solides dans ta carrière ? Et sur l’évolution d’apEX, est-ce qu’à l’époque, tu le voyais déjà prendre le lead un jour ?

Niveau co-lead, tu ne peux pas faire tout le boulot tout seul, il faut vraiment qu’il y ait une dynamique, que ça vive, c’est très important.

Pour Dan (apEX), à l’époque je ne pensais pas que ce serait possible pour lui de lead parce qu’il faisait trop d’erreurs. Je trouve ça incroyable qu’il fasse la carrière qu’il a eue avec ce type de profil. Je ne dis pas ça en mode négatif, c’est très positif, ça veut dire que, certes il avait des défauts, mais il s’est battu sur tous les autres points pour avoir des forces partout.

Là où je reconnais le côté lead, c’est qu’apEX, c’est une machine d’envie. Cette envie, cette obsession, ce besoin de travailler sur tous les points, c’est ce qui est le plus important pour un leader. On avait des visions de jeu très différentes avec Dan, il n’avait peut-être pas la même profondeur et il n’arrivait pas toujours à faire ce que je lui demandais. Mais c’était un énorme plaisir de jouer avec lui. L’envie qu’il apportait sur le serveur, grand respect, j’adore, je suis un grand fan d’apEX. Je suis vraiment très agréablement étonné de la suite de sa carrière.

Si on fait un petit bilan des gens avec qui tu as joué sur CS, on se rend compte que tu as joué, voire formé, la quasi-totalité des joueurs qui ont fini par lead sur CS:GO : Happy, shox, NBK, ALEX, apEX, etc. Est-ce tu as conscience d’avoir ce rôle de parrain de la scène sur le lead ? Est-ce que ça t’arrive de voir des choses "à toi" quand tu regardes les équipes menées par ces joueurs ?

J’ai totalement conscience d’être un peu le parrain de tout ça. Je ne dis pas ça avec ou sans modestie, c’est un fait, j’ai tellement bossé avec différentes équipes qu’automatiquement, j’ai lead tous ces joueurs.

Après, sur des setups qui seraient "les miens", tout appartient à tout le monde, tout le monde fait un peu tout. Je les ai peut-être faits avant tout le monde, mais si tout le monde se les approprie, peu importe qui les a inventés.

Pour parler plus précisément de NBK et shox, est-ce que tu les voyais devenir des leaders par la suite lorsque tu jouais avec eux ?

Oui, mais à tort, c’était une mauvaise idée ! (rires)

shox, il avait la compréhension de ce qu’il fallait faire, de ce qu’il ne fallait pas faire, une vraie profondeur. Mais il n’avait pas la patience, pas la maturité, il lui manquait beaucoup de ces qualités qui font que ça peut fonctionner sur le long terme. Il était capable de faire un super boulot. Ce qu’il fait quand je suis écarté chez G2, c’est mettre en place un jeu très simple. Mais c’est ce qu’il fallait faire avec ces joueurs, donc ce qu’il fait à ce moment est très malin. Donc pour moi il était capable, mais pas longtemps.

NBK, ses principales qualités c’est la solidité, le sang-froid, la simplicité dans son style de jeu. Il joue dans un endroit où il ne faut pas trop réfléchir, très souvent en fixe, il faisait la différence en étant sur son extrémité et en éclatant tout le monde. Mais de là à passer leader, il y a un fossé. Un shox qui va se lancer au lead, il a passé dix ans dans des rôles où il devait se poser beaucoup de questions et ressentir le jeu. NBK a peut-être l’envie et la détermination, mais il faudrait beaucoup de temps pour que ça fonctionne. Au premier abord, pour moi, c’est impensable. Pour que ce soit possible, il faudrait qu’il commence par un petit projet sans pression, avec beaucoup d’essais, d’erreurs, et ce serait le seul moyen pour que ça fonctionne. Mais ce serait très compliqué.

Après l’affaire KQLY, banni pour triche, vous baissez d’un cran dans le classement mondial, Titan devient une équipe top 10 et plus top 3/5. Pourtant, vous êtes une des rares qui arrive à battre fnatic de la grande époque (JW, flusha, pronax, olofmeister, KRIMZ) de façon constante. Comment tu l’expliques ? Est-ce que tu avais compris quelque chose que les autres n’avaient pas ?

Tout ce que je sais, c’est que les équipes qui battaient les autres tactiquement, je n’en ai jamais eu peur. Ça, c’est valable sur CS et ailleurs. Pendant deux ans, j’ai joué au baby-foot et j’ai battu les meilleurs joueurs belges, et la Belgique est une bonne nation. Je n’étais jamais aussi fort que quand je jouais les meilleurs.

Chez Titan, on avait des joueurs qui avaient tellement gagné qu’on n’avait pas peur d’eux. Quand tu as été le meilleur pendant longtemps et que tu joues un mec qui est très fort, tu sais ce que c’est, toi aussi tu as été fort, tu n’as pas peur. Et tu sais que quand tu étais fort, tu étais quand même battable, donc ça enlève cette barrière psychologique que d’autres avaient.

Tactiquement, ils ne nous posaient pas de problèmes. pronax prenait souvent l’ascendant en créant des moments de rupture, en créant du chaos chez les adversaires. Chez nous, il n’arrivait pas à faire exploser le système et du coup il y avait match. Et on était encore plus motivés parce qu’ils étaient les numéros 1.

Parlons des Majors avec Titan. Certains de tes anciens joueurs ont pu parler de "malédiction Ex6" aux Majors. Avec un peu de recul, comment expliques-tu le fait que tu n’as jamais réussi à franchir les poules, hormis au premier Major ? Est-ce qu’il y a des Majors, ou des matchs en particulier, qui te sont restés en travers de la gorge, sur lesquels tu as de gros regrets ?

Ceux où j’ai le plus de regrets, c’est les deux premiers (ndlr : DreamHack Winter 2013 et EMS One Katowice 2014). Les autres, j’ai du mal à m’en souvenir. Je sais qu’il y a des Majors où on arrivait à la place qu’on mérite.

Le premier, on doit battre NiP (ndlr : en demi-finale) et aller en finale. Après, contre fnatic, je ne sais pas ce qui se serait passé, ça aurait été très difficile, ils jouaient chez eux. Mais NiP, on doit leur mettre 2-0. On perd Dust2 16-13 je crois, tout juste, puis on les atomise sur Inferno (16-06) et ils nous atomisent sur Nuke (16-05). Inferno c’était sûr que c’était pour nous, Nuke c’était sûr que c’était pour eux, Dust2 c’était la map entre les deux. On aurait dû la gagner, on le sait, il y a eu des erreurs individuelles qui n’auraient pas dû arriver. Je pense qu’on était meilleurs qu’eux. On avait un peu le seum, on sentait qu’on avait déjoué. À ce moment-là, on pensait qu’il n’y aurait qu’un Major, c’était vraiment exceptionnel. On ne voyait pas long terme, ce qui était une erreur je pense. On se mettait trop de pression tournoi par tournoi. 

Le deuxième Major, on est encore en mode "on est solides", on vient de gagner le tournoi d’avant (ndlr : la DreamHack Invitational I). On perd Virtus.pro en ouverture, ils sont trop forts à ce moment-là. Avant le Major, même à l’entrainement, ils nous éclataient, c’était impressionnant. Les mecs étaient surmotivés parce que le tournoi était chez eux. Donc ils nous battent, le deuxième match on gagne contre une équipe dont je ne me rappelle pas (ndlr : mousesports) et arrive le match décisif, contre HellRaisers. On perd 16-14, on a tout fait faux. C’était le moment où on était en gaming house avec Titan, déjà première erreur, énorme erreur (rires).


La tragédie de Katowice 2014

Ça a été un enchaînement de mauvaises idées. J’adore Jérôme (NiaK), mais cette année je ne sais pas ce qu’il avait pris. Déjà la gaming house, c’était high risk/high reward pour passer de top 2 à top 1. Alors que high risk : tu peux perdre huit places, et high reward : tu en gagnes une. Rien qu’avec ce calcul, tu ne fais pas de gaming house.

Deuxième idée, pour ce tournoi, pour que tout le monde s’investisse, NiaK avait eu la brillante idée de charger tout le monde de regarder les démos d’une équipe. Donc le mec qui regardait les démos d’une équipe était responsable de la préparation contre cette équipe et des choix de vétos.

On arrive au dernier match, et qui a regardé les vétos d’HellRaisers ? C’est là que l’anecdote est incroyable, c’est SmithZz. SmithZz, c’est le pire joueur en termes d’antistrat’ que j’ai eu de toute ma vie. C’est le meilleur coéquipier, il comprend tout ce qu’on fait, mais sa plus grosse faiblesse, c’est l’antistrat’. Quand il fait une fixette sur une équipe, derrière il a peur de la jouer et il ne comprend plus rien.

En gros, on a une carte où on est imbattables, on ne l’a pas perdue pendant trois mois, on atomise tout le monde, c’est Dust2. Personne ne rivalise avec nous, side terro, side CT, rounds importants, on est trop forts. Et SmithZz n’a pas regardé leurs démos sur Dust2. Parce qu’il n’a pas regardé, on ne les joue pas dessus, parce qu’on part du principe qu’on veut savoir ce qu’ils font.

Nous voilà donc partis sur Inferno qui est leur meilleure carte, et on perd 16-14. Je ne sais pas à quel point c’est débile (rires). Même maintenant, ça me fout les nerfs. Il y a peu de moments dans ma carrière qui me foutent les nerfs, mais ça, c’est incompréhensible. Il y a une série de décisions de merde qui me passe au-dessus de la tête. Et encore, moi je suis capable de péter un câble en me disant "c’est le genre de mentalité qui va nous faire gagner sur le long terme". Richard (shox), il se dit "j’ai bossé deux mois et il y a un connard qui prend une décision de merde", il se barre de l’équipe. On n’a pas la même maturité et la même patience pour ce genre de choses.

Sur ce tournoi, on a trois maps où on est injouables et deux où on est nuls. Mais avec trois cartes, tu peux aller loin (ndlr : à l’époque, il n’y avait que cinq cartes dans le map pool compétitif). On était tellement forts sur certaines cartes qu’en bo3 on aurait mis que des 2-1. Ce qui aurait même pu nous enlever la pression sur les cartes où on n’était pas bons. Donc regrets de fou. C’est quelque chose qui reste en tête et qui ne va pas nous aider par la suite.

Dans les tournois d’après, la différence, c’est que j’arrive avec des équipes moins en forme, on n’a pas le même statut de top 1/2 que sur les deux premiers Majors. Ces deux premiers Majors, je me sens bien individuellement. Le premier, je suis très content, à ce moment c’était peut-être mon meilleur tournoi. Le deuxième, j’en suis content aussi, mais je sais qu’après j’en ai un ou deux où je me mets une pression que je n’avais pas avant, qui était la conséquence des deux premiers.

De manière générale, Titan a eu une histoire difficile sur CS:GO, des périodes compliquées, et le seul trait d’union de toute l’aventure, c’est toi. Est-ce qu’il y a eu des périodes de doute, de remise en question de ton lead, des moments où tu sentais que tu n’avais plus cette avance ?

Il y a toujours des remises en question mais je ne pense pas que mon lead était le problème. On a vraiment enchaîné des situations qui ont atteint notre motivation. Au début, c’est la gaming house qui flingue tout, et notamment Katowice 2014. KQLY, c’est un désastre, dans la lignée des Majors qui partent en couilles.

À l’heure actuelle, je me demande encore ce que j’ai fait pour mériter ça sur les premiers Majors. Le premier on doit au moins faire finale. Deuxième, c’est une blague entre la gaming house, la préparation et les idées de taré sur les démos, c’était fou. Troisième major (ndlr : quatrième en réalité, la DH Winter 2014), je n’ai jamais eu une préparation où on jouait aussi bien de toute ma vie. On massacrait tout le monde, on jouait fnatic et on leur mettait 16-4. C’était la meilleure équipe du monde et de loin, et on les déchire, c’était vulgaire. NiP pareil. Et une semaine avant, KQLY se fait ban. Mentalement c’est très dur, surtout avec des joueurs émotionnels comme apEX. Ça ne se passe pas bien du tout.

Titan, c’est que des moments durs. Certes j’étais là tout le temps, mais je ne me sens pas le seul responsable. Je ne nie pas qu’il y a des moments où je n’ai pas été au top et où j’aurais pu mieux faire, mais qui d’autre aurait fait un bon travail dans ma position ?

Est-ce qu’il y a des décisions, des matchs, des changements de joueurs où tu te dis "j’aurais pu faire mieux" ?

La venue de RpK, même si ce n’est pas moi qui décide. C’est le pire choix qu’on pouvait faire à ce moment-là, j’en suis sûr et certain. C’est un choix absolument débile, c’est un choix spectacle. Un mec qui n’a pas joué pendant deux ans ! (ndlr : Titan a rappelé RpK début 2015 alors que celui-ci avait pris sa retraite fin 2012) 

Et de nouveau, qui se colle tout le boulot, c’est moi. Mais ce n’est pas possible, c’est trop de boulot, trop de responsabilités.

Après Titan/G2, tu arrives chez LDLC dans un contexte totalement différent. Ce n’est pas une équipe qui est dans le top, avec des joueurs jeunes, peu expérimentés, que tu dois former. Quel bilan général tu dresses de cette expérience, ponctuée de quelques belles performances ? Quels sont les échecs, les réussites ?

J’en ai un très bon souvenir, à part les trois dernières semaines. C’est la première fois de ma carrière où je devais changer de mentalité. On ne jouait plus pour être numéro 1 mais pour être la meilleure version de nous-mêmes. On doit tout donner, quitte à trouver la limite et à exploser. Mais surtout, être fier de donner la meilleure version de nous-mêmes. Avec cette équipe, j’ai beaucoup aimé que tout le monde se donne à fond.

On est partis de loin. Quand j’arrive, je crois qu’ils sont au-delà du top 50 HLTV, on n’arrivait pas à gagner un match. Dès qu’on jouait une bonne équipe, on se faisait massacrer. C’est la preuve qu’en travaillant, tu peux monter. La façon dont on a grimpé les échelons avec cette équipe, c’était magnifique. J’en ai un super souvenir.

Je me souviens qu’on était 60ème mondial, la première lan c’était en France, les EPS, un truc du genre (ndlr : les Finales du Championnat National saison 1 en 2016), ça me donnait envie de me couper les veines (rires). Tu passes des gros tournois où tu joues la première place à ça. Et encore, j’étais content d’aller chez LDLC, j’avais besoin de retrouver un endroit où bien travailler, retrouver mon jeu avec moins de pression. Malgré tout, gros choc quand j’arrive au début. Mais la montée et l’évolution, c’était génial.


Malgré une conclusion compliquée, excellent souvenir de chez LDLC

 

Tu as longtemps eu la réputation d’être un bosseur solitaire. Est-ce que c’est un vrai choix personnel ? Et surtout, est-ce que ça a pu te desservir dans la deuxième partie de ta carrière, lorsque tout le reste de la scène a commencé à avoir des coachs, des analystes ?

C’est une question délicate. D’office, j’endossais pas mal de casquettes. Et je pense qu’au début, c’était un peu bizarre d’avoir des gens qui interféraient là-dedans. Ça a sûrement été une petite faiblesse pendant un moment. Après, j’avais des analystes et ça se passait très bien. J’ai toujours essayé d’avoir des analystes autour de moi. Il y a juste eu deux-trois petites embrouilles avec Ozstrik3r à la fin de LDLC.

Sans rentrer dans les dramas mais de manière générale, est-ce que tu penses qu’un coach avec qui tu te serais entendu t’aurait permis d’aller encore plus haut ?

Bien sûr, avoir un duo fonctionnel à ce niveau-là, c’est hyper important. Mais le côté "bosser tout seul", ce n’est pas vrai. J’ai toujours adoré bosser avec des gens et je me trouve bien plus productif si je travaille avec quelqu’un, c’est plus motivant. J’aime avoir un duo. Ça peut être un joueur, mais souvent c’est compliqué parce que ça fait trop de travail pour lui.

Donc j’aimais bien partager entre SmithZz, une toute petite partie avec des joueurs comme shox, etc. Puis le reste avec NiaK, qui avait plus de recul. J’avais un super équilibre avec lui. Je n’ai pas retrouvé une personne de confiance, ce binôme que j’avais avec NiaK.
 
Un peu comme ce qu’on a perçu de la relation apEX/XTQZZZ chez Vitality.

C’est génial, hyper important. XTQZZZ est génial. C’est sûr qu’il est bon, tu l’entends parler et tu sais qu’il est bon. Beaucoup de regrets de ne pas l’avoir pris. J’ai eu le choix entre lui et Ozstrik3r chez LDLC. Et on a pris Oz pour une certaine raison, qu’il n’a jamais remplie.

Pour les gens qui te suivent depuis longtemps, tu avais aussi cette image de leader charismatique, avec des vidéos de discours enflammés d’avant-match, quelqu’un de très expansif pendant les rencontres. C’est quelque chose de naturel pour toi ou tu as dû le travailler ?

Je pense que j’ai toujours eu la bonne approche, l’approche juste qui t’enlève la pression, qui te donne de la force. J’arrive à ressentir ce que les gens ont besoin d’entendre, je sais comment fonctionnent mes joueurs, j’adore échanger avec eux de façon transparente et profonde. Je veux que quand je parle ça sonne, qu’il se passe quelque chose. Il y a peu de small talk, c’est des discours que je préparais un peu, mais quand tu as vraiment envie, ça vient tout seul.

D’un point de vue spectateur, on avait aussi l’impression que tu étais un peu plus en retrait à la fin de ta carrière de ce point de vue-là. Cet aspect de leader ultra-charismatique ressortait moins pour les viewers. Est-ce que c’est quelque chose que tu as remarqué ?

Chez LDLC pas du tout, je pense que j’avais encore ça, je prenais beaucoup de place. Chez Titan il y a des périodes difficiles, tant dans l’équipe que sur le plan personnel, donc il y avait moins de confiance, moins de lucidité, donc c’était moins présent.

Aujourd’hui, je pense que j’ai encore ça sur Valorant. Ça dépend toujours du contexte, mais quand ça fonctionne je garde cette envie d’aider et de pousser les autres.
 
Tu as aussi eu une expérience à l’international avec GamerLegion. Qu’est-ce que ça t’a apporté ? As-tu eu l’impression d’arriver sur quelque chose de vraiment neuf, comme une page blanche par rapport à ce que les joueurs pensaient de toi en amont ?

Franchement, le projet, c’était de la merde. Tu avais trois joueurs qui n’en avaient rien à foutre : HS, ScreaM et naawk. Juste de la merde, je n’ai rien appris, à part parler anglais, c’était vraiment nul.
 
Tu as également un peu coaché TheDice. Tu avais déclaré que c’était un rôle qui t’intéressait, et finalement ça n’a pas duré très longtemps, tu es repassé joueur sur Valorant. Est-ce que c’est l’expérience qui s’est mal passée ou le rôle de coach qui ne t’a pas convenu ?

Ah non, moi c’est quasiment sûr qu’un jour, je serai coach. L’expérience chez TheDice s’est très bien passée. Je pense que s’il n’y avait pas eu Valorant, j’aurais continué ma carrière de coach sur CS. En fait, je n’avais pas envie de passer coach comme d’autres, je voulais prendre mon temps : faire deux-trois petites équipes, apprendre mon rôle à mon aise, faire mes petites recherches. Je n’ai pas envie de faire partie de ces gens qui veulent sauter directement sur le rôle pour prendre la thune où elle se trouve, des gens qui n’ont pas les compétences mais qui arrivent à décrocher ces postes. C’est ma façon de faire les choses, je ne voulais pas sauter directement dans le truc.

Chez TheDice, il y avait un côté test, mais ce n’était rien de spécial. On a passé un mois ensemble avec une super ambiance, pour les aider, mais ce n’était rien de fou. Ce n’est pas en un mois que j’allais apprendre le métier.

TheDice a cette image d’équipe du subtop qui est toujours sur le point d’arriver à percer et à passer un palier mais qui se rate toujours à la dernière marche. Est-ce que tu as eu un diagnostic sur cette situation, après le mois que tu as passé avec eux ? Est-ce que vous en avez parlé ?

La réponse va être dure, mais tout le monde la connaît : individuellement, ils ne sont pas assez forts, et ils se plaisent à ce niveau. Quelque part, ça leur va. Même sans trop de talent, je pense qu’on peut faire mieux que ce qu’ils font, mais ils sont dans un confort.
 
Dernière question importante : est-ce que tu continues de suivre CS:GO ?

Oui bien sûr. J’adore regarder Vitality, mais je suis un peu tout. J’ai suivi l’ascension de DBL PONEY, j’essaye de suivre ce qui se passe en France. Mais je dois avouer qu’il n’y a pas grand-chose qui m’emballe en dehors de Vitality. J’aime bien Djoko chez DBL PONEY, je trouve qu’il a différentes qualités, qu’il a un bon équilibre dans son jeu. J’ai entendu dire qu’il était même capable de lead. Mais à part lui, je ne vois pas grand-chose d’excitant sur la scène. Et c’est un problème depuis longtemps, il y a peu de joueurs qui sortent en France comparé à des pays comme le Danemark.

Cette interview, de même que celles de krL, HaRts et bisou, a été utilisée
dans "Leader in-game, le podcast", à écouter ici.

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